Episode 12 : “L’AIDE AU RETOUR VOLONTAIRE” : Merci aux Winners.

Bakou : plusieurs indicateurs suggèrent au voyageur qu’il est bien dans une rĂ©publique bananière tenue d’une main de fer par l’oligarchie locale et la famille Alyev : le plus grand drapeau du monde surplombe la ville, partout des photos et des statues d’Alyev père et fils, des “Alyev Supermarkets”. Dans l’ hypercentre tout neuf de Bakou, on se croirait Ă  Dubai : que des boutiques de luxe, tout brille mĂŞme le sol. Autour, des constructions souvent sans Ă©lectricitĂ©

ni eau, mais bon ça se voit pas, parce qu’ici on dirait qu’on prend grand soin des façades ! Presque plus qu’ailleurs la merco perturbe le paysage…alors on en profite pour faire des photos d’abord devant la mosquĂ©e de Bakou et ensuite devant le fameux “MINISTERE DES SITUATIONS D’URGENCE”, seule organisation autorisĂ©e Ă  dĂ©ployer des troupes dans le pays sans autorisation du parlement…pratique pour les manifestations.On se dit qu’il faut quitter Bakou avant d’avoir des problèmes. Sur la route, on croise plusieurs puits de pĂ©trole…et je dĂ©cide de faire quelques photos de la mercedes devant les puits.On croise un barrage de police qui nous calcule pas. On installe la merco devant les puits, quelques photos et lĂ  ça commence. Une première voiture de flics s’arrĂŞte. Il sorte Ă  trois et commence Ă  crier. Le temps de se faire comprendre, c’est d’autres voitures qui arrivent en renfort. L’un des policiers avec une tĂŞte d’olive, des yeux de poisson et des dents en

or m’explique que nous venons de violer une propriété de l’Etat et donc de la famille Alyev et que c’est très grave. Il me dit en gros : soit tu

payes tout de suite 5000 euros, soit tu sors pas d’Azerbaidjan et direct la case

prison pour 1 mois minimum. Le mec lache rien et pour être sur que je comprenne bien la gravité de la situation appelle plusieurs fois au téléphone son supérieur qui parle

anglais et qui me dit que j’ai intérêt à payer, sinon ils vont lancer une procédure officielle et là ce sera mort. Je demande à appeler l’ambassade de France. Pire, le gars ajoute que je peux sans

problème appeler, mais qu’ici c’est pas la France qui dĂ©cide. Nadia commence Ă  crier et Ă  pleurer…les flics tapent comme des fous sur la voiture. Rien Ă  faire, les flics la prennent par le bras pour la faire rentrer dans la merco et lui disent “No

Madame, No Madame, no ???”. Elle est verte. Maintenant c’est dix voitures qui encerclent la merco. Je leur dis que j’ai pas l’argent. Pas le choix, il faut payer. Il nous reste 1200 euros planquĂ©s dans une enveloppe Ă  l’arrière de la

voiture et qu’on gardait pour les “situations d’urgence” et surtout pour rentrer. Je suis obligĂ© de la sortir sinon ça risque de nous coĂ»ter beaucoup plus cher. Pas de cul, le flic Ă  la tĂŞte d’olive veut plus et propose de nous accompagner

Ă  une banque pour retirer…De la pure science fiction ! Il prend le volant de la merco, demande Ă  Nadia de lui garder sa casquette et roule Ă  fond jusqu’à une

banque. Dans un de mes moments de pure inconscience…je sais pas ce qui me prend… je

ressors l’appareil pour prendre tĂŞte d’olive en photo, histoire d’ immortaliser ce grand moment de “Marseille-Bakou” : Une merco de gitan reprĂ©sentante off-ficielle de Marseille capitale europĂ©enne de la culture en 2013 conduite Ă  fond la caisse Ă  Bakou par un flic de la mafia azĂ©rie qui nous amène retirer de quoi payer son loyer et de quoi financer un nouveau sourire en or ! Si ça c’est pas de l’ Ă©change culturel ! C’est trop…il l s’énerve…on manque de se prendre un camion. No photo ! Il me fait effacer la photo. On arrive Ă  la banque et impossible de retirer de l’argent. La carte ne marche plus. TĂŞte d’olive insiste…et me dit que les français sont

plus riches d’habitude…Je lui explique que je travaille pas dans une compagnie

de pĂ©trole et je lui dis : “mais moi Monsieur je suis peintre !?! (N’importe quoi), Arrrtist-Culturale-Popular No Money. Je lui montre les boĂ®tes de vache qui rit et le pain pourri qu’on avait dans la voiture..”.Vache qui rit …no money”. Il finit par comprendre qu’on est vraiment Ă  payole et accepte de nous laisser repartir. Il reprend le volant de la merco, s’arrĂŞte en chemin pour faire ses courses et nous ramène Ă  fond lĂ  oĂą on avait Ă©tĂ© arrĂŞtĂ©. Il nous fait effacer les photos de la merco devant les puits de pĂ©trole. Malheureusement, il faut reprendre la route et quitter nos nouveaux amis de la mafia. On se dit au revoir en promettant de revenir l’annĂ©e prochaine avec

d’autres “peintres todos countries” pour un autre de ces Ă©changes interculturels

si enrichissants. La route jusqu’à Tbilissi sera de loin notre pire trajet : 1) Nadia me met la pression pour quitter au plus vite l’Azerbaidjan…mais ici limitation de vitesse entre 30 et 60km/h 2) on se fait arrĂŞter tous les 50 kms. MĂŞme histoire, ils veulent de l’argent mais on a plus rien. Je distribue des tee-shirts. 3) Et pour finir, on a grillĂ© le

budget retour : plus un rond pour rentrer en France. Quelques heures après : la frontière avec la GĂ©orgie, mĂŞme scĂ©nario qu’à l’entrĂ©e. Nadia passe vite mais moi je dois lâcher des tee-shirts du conseil gĂ©nĂ©ral pour passer. Nous revoilĂ  en GĂ©orgie. ArrivĂ© Ă  Tbilissi, il faut sauver “Marseille-Bakou”. La merco souhaitant partir volontairement du Caucase doit solliciter l’aide au retour auprès des Winners. J’appelle du ccf mes amis Rachid et Dany des Winners qui acceptent de financer ” l’aide au retour ” au titre de “dĂ©veloppement solidaire de

Marseille-Bakou” et des migrations de la merco. Il faut sauver Trotinette !!! On

reçoit l’argent dès le lendemain matin via western union. Mais on est pas au bout de nos peines. Techniquement il est très difficile de quitter le Caucase : 1) Impossible de traverser les régions séparatistes de Russie. 2) L’Ukraine ne délivre plus de visa aux français. 3) Le seul ferry qui

relie la GĂ©orgie Ă  la Bulgarie est en panne, bloquĂ© au port de Poti pour un mois. 4) Pas le choix, il faut retourner en Turquie et tenter de prendre un bateau Ă  Trabzon pour traverser la mer noire. Au final, pas de ferry Turquie-Bulgarie, mauvais coup… il faut donc retraverser la Turquie, cette fois par le Nord. EpuisĂ© et sous perfusion de redbull, je roule en mode fou du volant. Bonne performance : on traverse la Turquie en 24 heures ! On dort

quelques heures dans la merco à la frontière avec la Bulgarie, côté bulgare mais

en face du Mustapha Market. Le matin on reprend la route…direction la Roumanie-Bucarest. Tout va bien…comparĂ© Ă  ce qu’on vient de passer c’est presque des vacances…la merco dans les Balkans, c’est comme jouer Ă  domicile. On arrive Ă  la frontière avec la Roumanie…lĂ  en voyant que la voiture Ă©tait hyper chargĂ©e, les douaniers nous demandent plusieurs fois : Two people ??? Are you sure ? Controle rapide des affaires accumulĂ©es Ă  l’arrière histoire de vĂ©rifier qu’on transporte aucun passager clandestin et ça passe : WELCOME IN ROMANIA ! Vrai miracle de ce voyage : c’est du pays des Roms que je vous Ă©cris l’épisode de “L’ AIDE AU RETOUR VOLONTAIRE”. Proxima estation : Slovaquie.

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